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L'émission American Idol vit ses dernières heures

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- - Kevork Djansezian - Getty - AFP

Le télé-crochet culte, qui avait réuni jusqu'à 31,2 millions de téléspectateurs en moyenne en 2005, disparaîtra du petit écran américain ce jeudi soir.

L'émission de téléréalité musicale American Idol, devenue une institution aux Etats-Unis, entame mercredi sa quinzième et dernière saison sur la chaîne Fox, usée par la concurrence et le désintérêt croissant du public pour le direct. C'est un monument qui s'apprête à disparaître du paysage télévisuel américain début avril, après la finale de la quinzième édition.

Créé en 2002, American Idol a trôné en tête des audiences huit saisons durant, entre 2003 et 2011, réunissant jusqu'à 31,2 millions de téléspectateurs en moyenne en 2005-06.

Des inconnus propulsés au rang de stars

Le principe est simple: des milliers de candidats, aspirants chanteurs, auditionnent devant un jury de célébrités, puis s'affrontent au fil des semaines dans une compétition tranchée par les votes des téléspectateurs. American Idol n'est pas une création américaine, mais un concept adapté de l'émission britannique Pop Idol.

"Il y avait déjà des télé-crochets aux Etats-Unis à la fin des années 1940", rappelle Dominic Caristi, professeur à l'université de Ball State. Mais "l'élément nouveau, ici, c'est que l'émission a relancé l'idée que les gens pouvaient devenir une star", selon lui.

A commencer par Kelly Clarkson, qui était serveuse dans un café-théâtre au Texas lorsqu'elle fut couronnée en 2002 lauréate de la première édition, à 20 ans. Depuis, la jeune femme a vendu plus de dix millions d'albums et reçu trois Grammy Awards, les trophées décernés chaque année par la profession musicale.

Concurrence d'internet et de The Voice

Phénomène rare, plusieurs chanteurs issus des premières saisons d'American Idol se sont inscrits durablement dans le paysage musical américain.

Carrie Underwood (2005) est devenue une référence de la country et a vendu près de soixante millions d'albums, tandis que Jennifer Hudson (2004), chanteuse et actrice, a déjà gagné un Oscar et un Grammy.

"Nous créons vraiment des superstars. Nos vainqueurs sont à Broadway, dans des films, ils animent des émissions de télévision. C'est ça qui nous différencie des autres", avance Simon Fuller, le créateur britannique d'American Idol, dans une séquence diffusée avant le début de la quinzième saison.

Simon Cowell bouscule les codes du petit écran 

Le décollage de l'émission doit également beaucoup à la virtuosité de l'animateur Ryan Seacrest et à la personnalité du plus célèbre des jurés d'American Idol, Simon Cowell. Ce Britannique à la chemise invariablement ouverte sur un poitrail velu, a bousculé le public américain. Ses remarques corrosives mais souvent pertinentes tranchaient avec le politiquement correct omniprésent ailleurs. Il est parti en 2010.

"Je pense que cela a changé la télévision aux Etats-Unis. Des émissions comme American Idol ou Survivor ont donné le ton de la téléréalité que nous voyons aujourd'hui", estime Dominic Caristi.

Mais la source s'est tarie depuis dix ans et aucun concurrent n'a plus connu la gloire. L'émergence d'internet, de la diffusion musicale et vidéo en ligne, ont imposé à American Idol une concurrence féroce.

"Les jeunes qui veulent devenir stars de la musique ont maintenant cet espoir de faire une vidéo, de la poster quelque part et d'attirer l'attention", résume Dominic Caristi.

La difficulté de créer le 'buzz'

En 2011, une autre grande chaîne gratuite, NBC, a également contribué à cet affaiblissement en lançant The Voice, dont les audiences ont dépassé celles d'American Idol en 2013-14, même si les deux programmes ne sont pas diffusés au même moment de l'année.

Plus grave, le télé-crochet souffre de la désaffection du public pour le direct, en particulier chez les jeunes, mouvement qui pénalise moins les séries ou les émissions enregistrées, qui peuvent être regardées en différé.

"De plus en plus de gens regardent (un programme) au moment qui leur convient", souligne Dominic Caristi. Autre inconvénient, pour lui, "cela devient plus difficile de faire du 'buzz' sur les réseaux sociaux".

Romain Iriarte avec AFP