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Guide pour réussir à supporter l’open space

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Bienvenue dans le monde merveilleux de l’open space, où il est impossible de passer un coup de fil ou d’éternuer sans que tout le monde soit au courant. Pour résister, suivez le guide.

L’open space a conquis les USA dans les années 50, avant de séduire l’Europe il y a une trentaine d’années. Ce concept, mis au point par deux consultants allemands, les frères Schnelle, avait comme objectif de faire disparaître l’individualisme en faisant tomber les cloisons. Pensé avec de bonnes intentions, ce devait-être un espace agréable, agrémenté de plantes vertes. En réalité, il s’est révélé être un moyen pour accumuler des salariés dans un espace réduit.

60% des personnes travaillent en open-space, dont la moitié se dit ne pas être satisfaite, selon Actineo, l’Observatoire de la qualité de vie au bureau (mai 2013). Si l’INRS (Institut national de recherche et de sécurité) recommande 15 m2 par personne au minimum dans un espace collectif, on se rapproche en réalité plus des 10m2, voire même 7 ou 8m2. Et tant que la Loi ne précise rien à ce sujet, l’espace vital de chacun n’est pas considéré comme une priorité.

Surnommée l’"open stress", cette configuration aurait tendance à favoriser les bruits et les odeurs plus que les idées. Agnès Weiss, consultante et coach en entreprise, et Élisabeth Pélegrin-Genel, architecte et psychologue du travail, nous donnent des conseils pour s’en sortir une fois dans l’arène.

Créer sa bulle

"On vend toujours l’open space comme un concept jeune et fun", explique Alexandre des Isnards, coauteur de L’open space m’a tuer (éd. Le Livre de Poche). Dans ce type d’espace, le travail en équipe est facilité, chacun peut participer aux débats, on prône la positive attitude, et la hiérarchie s’efface. On ne vouvoie plus son patron, et on lui envoie même des poke ; tout est bon pour s’amuser et d’ailleurs, on ne vient pas en se disant qu’on va travailler.

Dur de réussir à se focaliser sur son travail dans l’agitation ambiante, sans compter les bruits parasites : téléphones aux sonneries improbables, collègues qui tapotent nerveusement sur la table avec leurs stylos, mastication, et bien sûr, le compte-rendu de week end du voisin de bureau.

La solution serait de suggérer gentiment aux collègues bruyants de continuer leurs discussions dans la salle de pause, ou à ceux qui font leurs confcalls d’aller en salle de réunion. Mais pour éviter de se faire détester par toute la boîte, le mieux reste d’écouter les conseils d’Agnès Weiss : "il faut savoir s’isoler à l’aide de boules Quiès ou d’un casque, ce ne sera pas mal perçu si on prend soin d’expliquer qu’on a parfois besoin de se retrancher pour travailler. Toujours rapporter le problème à sa propre sensibilité plutôt qu’accuser l’autre."

Suggérer des améliorations possibles

La hausse du prix de l’immobilier a entrainé la réduction des lieux de travail qui se transforment peu à peu en élevage en batterie. Une ressemblance rappelée par la position des collaborateurs, tous alignés en rang d’oignon derrière les bench.

Dans cet espace réduit, il faut composer avec celle qui a du mal avec les néons ou encore celle qui referme toujours la fenêtre sous prétexte qu’elle va tomber malade. S’il est impossible de monter des murs pour délimiter sa zone, on peut au moins essayer de la personnaliser en y mettant ses bibelots ou en changeant son fond d’écran.

En cas de problèmes qui vous empêcheraient de travailler, comme un emplacement plutôt défavorable dans la lignée des toilettes ou dans un courant d’air, pensez toujours à privilégier le dialogue avec le manager, en lui suggérant des améliorations concrètes. Face à des demandes validées par toute l’équipe, il ne pourra pas les ignorer. "Le groupe peut se réunir pour lister les changements souhaités (nouveau store, écran anti-reflet, etc.), chacun va parler de son organisation et il sera alors plus facile d’évoquer ce qui dérange", explique la psychologue Élisabeth Pélegrin-Genel.

Eviter de se sentir épié

Les ardents défenseurs de l’open space mettent en avant "le travail en équipe" et "la coopération harmonieuse et créative" que ce type d’espace favorise. Au milieu, le manager, tel un chef d’orchestre, apporte dynamisme et esprit à son équipe.

Il est vrai qu’au temps des bureaux individuels fermés à double tour et gardés par une secrétaire, les idées ne décollaient que le 14 juillet. Mais qui dit libre propagation des avis, dit aussi libre propagation de la malveillance. Tout le monde s’épie et observe l’écran de l’autre, sans même le faire de manière consciente, simplement pour voir s’il travaille et s’il n’est pas sur Facebook ou sur son compte eBay. Chacun de nous possède une face sombre qui veut balancer les autres. "La surveillance et la mise en compétition des salariés entre eux ne vont pas dans le sens de la productivité ni de la créativité ; on arrive à l’inverse du but recherché", souligne Agnès Weiss.

N’essayez pas de partir du bureau à 18 heures, car même si vous êtes arrivé à 8 heures, personne ne le sait, et trente paires d’yeux vous fixeront en même temps. Pour y faire face avec humour et lutter contre la parano, vous pouvez vous équiper du kit de survie "spécial open space", ou Cubicle Survival Kit, lancé en 2002 par un jeune Américain. A l’intérieur, entre autre, vous trouverez un rétroviseur panoramique et un panneau "come back later". Si l’idée vous amuse, vous pouvez aussi créer votre propre kit.

Pour aller plus loin : 

Guide de survie en open space, de Pétronille (éd. Leduc.S). Pétronille, jeune cadre habitué à évoluer dans ce milieu hostile, livre ses astuces décalées, à travers 80 listes très drôles. Vous saurez quels sont les voisins à éviter à tout prix, et les dix feintes pour faire semblant de travailler.

Valérie Rodrigue pour BFMTV