BFM Business
Conso

Le cercle familial : un milieu qui nous colle des étiquettes

-

- - Shutterstock

Dans le milieu familial, chacun porte une étiquette, que ce soit de manière consciente ou non : l’originale qui va toujours à contre-sens, la gentille que tout le monde aime, ou encore la belle à qui l’on ne demande rien de plus. Des clichés qu’il est difficile de faire tomber avec le temps.

Un dimanche, en plein repas familial. Pierre "le grand" de 42 ans, essaie de désamorcer la tempête qui menace de s’abattre entre son petit frère, l’ado éternel de la famille malgré ses 35 ans, et sa sœur, la fille sérieuse "du milieu" qui réussit tout. Cette scène ne vous est pas étrangère ? Vous avez dû la ressentir plus d’une fois, cette sensation bizarre de rejouer sans cesse une pièce dont les personnages ont été distribués sans qu’on ait pu choisir le sien. Le rôle de la fille valorisée parce qu’unique, celui du grand frère protecteur, ou au contraire, de la sœur effacée au profit des autres.

Se détacher des clichés

Or, comme l’observe la psychothérapeute Nicole Prieur*, "ce qui est considéré comme un destin n’est quelquefois qu’un mandat transgénérationnel qui se transmet, mine de rien, par projections et identifications". C’est ce qu’a connu Agnès, l’aînée "élevée au milieu des petites voitures" comme si elle était le garçon que ses parents rêvaient d’avoir. Elle est finalement devenue médecin, comme son père et son grand-père. Dans cette mise en scène, les défunts jouent aussi un rôle et alourdissent parfois nos bagages, au-delà des non-dits.

En voulant remplacer un enfant mort sans y parvenir, par exemple, on peut répéter un scénario familial. S’il ne faut pas rejeter son appartenance à sa famille et à son héritage, il faut savoir se rendre "pilote de son existence", explique le psychiatre Pierre Benghozi. En faisant attention à ne pas y perdre ses plumes en se reniant.

C’est l’épreuve que Sabine, 54 ans, a dû traverser : "J’ai toujours été le pivot de ma famille. “Le petit cheval blanc” chanté par Brassens, courageux et sortant par tous les temps, c’est moi ! J’assure, comme mère solo, chef d’entreprise et auprès de ma mère âgée, contrairement à mon frère, qui fuit la mort. Un “formatage” peut-être hérité de ma place de fille chérie. Possessif, mon père était fou de moi. On m’a toujours dit que je lui ressemblais. Fils de mineur, battant, il a travaillé dur pour payer ses études. Pour ne pas le décevoir, je suis une bosseuse – je travaille dans l’artisanat d’art, comme lui – et je tente de tout faire bien. A cette différence que j’essaie de lâcher prise… Quitte à déstabiliser ma famille: avant, j’assurais sans piper mot. Maintenant, je m’autorise à dire mes désaccords !"

* Auteur de «Nous nous sommes tant trahis. Amour, famille et trahison» (Denoël).

Isabelle Soing pour BFMTV