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Sexe "neutre", les oubliés du genre

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- - Flickr/CC/Maurice Von Mosel

Ni homme ni femme, mais "sexe neutre". Pour la première fois en France, une personne née sans appareil génital complet a obtenu de la justice de faire modifier son état civil, mais cette décision est contestée en appel.

En août dernier, pour la première fois en France, la justice française a reconnu l'existence d'un troisième sexe, le sexe "neutre". Cette décision est aujourd'hui contestée en appel.

Il n'existe pas de chiffre officiel mais on estime que cela concerne qu'un enfant sur 2000 naît intersexués dans l'hexagone. Pour Michel Schouman, médecin urologue, estime qu'il est nécessaire d'assigner un genre à ces patients intersexe: "On regarde ce qui dominant et ce qui est le plus vraisemblable et le plus facile à réaliser et à faire vivre pour l'enfant. Un presque garçon, on va le transformer plutôt en fille parce qu'il est plus facile d'enlever des organes que de construire des organes. On est dans une société construite autour du masculin/féminin et l'on doit faire partie de l'un ou de l'autre. Il vaut mieux assigner en sachant que l'on fait des erreurs et sachant qu'un certain nombre ne le vivront pas bien".

"J'ai des cicatrices partout"

Mais de nombreux témoignages montrent que cette assignation n'est pas sans conséquence. Invisibles, isolées, les personnes intersexes ont toutes des parcours difficiles. C'est le cas de Vincent. Quand il nait, il n'est ni complètement un garçon, ni complètement une fille. Les médecins prennent alors la décision de lui assigner le sexe masculin: "On a retiré tout ce qui ne leur plaisait pas. Je ne sais pas exactement ce qu'on a retiré mais le fait est que j'ai des cicatrices partout. J'ai des infections urinaires en permanence, j'ai des incontinences".

Malgré les opérations, malgré les hormones, jamais Vincent ne parvient à se sentir homme: "J'ai essayé de jouer ce rôle-là sauf que ça ne marchait pas, ce n'était pas moi, mon corps, mon esprit. Je fais encore des cauchemars, j'ai de très gros problèmes de santé, ma vie quotidienne est très compliquée".

Nina, 44 ans, souffre aussi de son assignation: "J'ai été opérée à 17 ans lorsqu'on a découvert mon intersexuation et j'ai été opérée à mon insu, on m'a mise sous traitement hormonal. On m'a donné un traitement hormonal féminin qui m'a transformé en femme. Je ne me sens jamais trop à ma place, je sais que ce qu'on a choisi était pour sauver les apparences sociales mais ça ne correspond pas forcément à ce que je suis".

"Enfin une place pour exister"

Beaucoup de souffrance, de solitude, mais aujourd'hui, enfin, un peu d'espoir.

"Ce jugement permet de fin au principal prétexte pour les mutilations qui serait qu'il faudrait forcément déclarer un sexe garçon ou fille, maintenant ils n'ont plus de raison d'opérer puisqu'on peut déclarer un sexe neutre", se réjouit Vincent.

Nadine, quant à elle y voit une acceptation de son genre: "Les opérations d'assignation visent à détruire ce que nous sommes pour nous faire entrer dans un rôle d'homme ou de femme, donc on perd notre intégrité. C'est vrai que cette existence juridique c'est une première et c'est enfin avoir une place pour exister".

P.B. avec M.R.